Nous,
les Walkers, nous aimons découvrir de nouvelles adresses où l’on peut
s’encanailler. Lorsque ces adresses sont en lien avec l’Histoire de Paris et
son patrimoine culturel, c’est encore mieux. La Vénus Noire , poétiquement
perchée rue de l’Hirondelle, près de la fontaine Saint Michel, fut l’un des
repères favoris d’artistes tels que François Villon (poète du Moyen Âge et
bandit notable !) Oscar Wilde ou Paul Verlaine. D’autres poètes ont laissé
leur nom gravé dans la pierre, ainsi que leur empreinte dans l’identité de
l’ancien « Caveau de la
Bolée ». Deux brunettes sont actuellement les gardiennes
du lieu, elles taillent chaleureusement la bavette au zinc qui marque l’entrée
du bar.
La construction de cet
établissement aussi discret qu’illustre remonte au XIIIe siècle. Il a gardé sa
simplicité initiale de taverne tortueuse, avec son étroit couloir de l’entrée à
la salle du fond, le long duquel de petites tablées se succèdent. La lumière y
est tamisée voire faiblarde, mais, loin de créer une atmosphère sordide où
Nosferatu se sentirait à son aise pour boire une pinte (de sang ?), elle
plonge dans une douce pénombre les toiles, sculptures et livres qui se nichent
dans les coins. Toiles d’arts abstraits et autres bibelots hétéroclites
trouvent leur place aux côtés d’ouvrages spécialisés sur les jeux d’échec (car
oui, la salle du fond se prêtait à de nombreux tournois auparavant), et autres
« L’astronomie pour les Nuls », « Comment parler chat »,
sans compter quelques romans policiers. Le sous sol, par lequel on accède via
deux escaliers poudreux, est tout aussi sympathique que l’étage du dessus,
quoique tenant plus du labyrinthe que de la cave. Trois (ou quatre, on ne sait
pas exactement) petits salons voûtés, aux poufs et banquettes moelleuses,
accueillent les groupes d’amis. Il peut arriver aux retardataires de se perdre,
et de se retrouver à une sauterie où ils n’ont pas été invités. Amusant !
Tantôt poétique et sombre tantôt branchée et en pleine lumière, la Venus Noire nous séduit dans toutes les situations.
La cave accueille le week-end des
DJ sets variés, electro, funk ou
80’s, selon le moment : lors de mon anniversaire, nous nous sommes
trémoussés sur de la house élégante et accessible, sans être commerciale. Le
tout mixé par un sympathique DJ, habitué de ce genre de fête et très souriant. La Vénus Noire est aussi un repaire
jazzy : chaque mercredi, des jam
sessions réunissent deux artistes, Julien et July, multi-instrumentistes et
fou de jazz, sous toutes ses formes. L’entrée est libre, et on peut écouter à
la cave du Django Reinhardt, du Chet Baker, mais aussi de la chanson française.
Un petit bar, réplique de celui
de l’étage, s’ouvre pour les spectateurs et noceurs qui se pressent dans la
cave aux heures les plus avancées. On y choisit son cocktail, parmi une gamme
de classiques (le Mojito est tout bonnement grisant, attention à ne pas le
boire trop vite) et de créations originales, hommages aux poètes qui firent une
halte dans le giron de Vénus. Le Baudelaire, que j’ai dégusté au cours de ma
première visite, était à la fois capiteux et frais, avec ses notes douces de
pomme et de vin rouge, comme un parfum ancien. Plus pêchu, le Moulin Rouge,
aussi éclatant dans son long verre que la robe de Satine, tourne très vite la
tête et comblera les becs sucrés. Les cocktails évoluent au fil des mois :
si vous êtes amateurs de Chartreuse Verte, la patronne fête les 400 bougies de
la célèbre liqueur depuis le 16 mai 2014. On peut aussi boire du vin, avec une
petite planche de charcuterie à 12 euros (quand même !), ou à 15 euros si
vous désirez du fromage. Le prix pique un peu, mais le tout est délicieux. Sinon,
Saint Mich’ regorge de petits grecs et de crêperies, il vous sera toujours
possible d’aller chercher à manger à l’extérieur.
L’happy hour jusqu’à 21 heures
est très appréciable, car les cocktails restent un peu chers. Peu importe, y a
d’la bière ! Tout le monde trouvera son bonheur dans cette grotte
mystérieuse et joyeuse, car on y boit et écoute de tout. Le bar est très vite
rempli, et devient un vrai souk où l’on se sent bien, avec des gens de tout
âge, à voile, à vapeur, en costard, à lunettes, à jupette. La nuit sera longue…
Margot
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