Parmi la multitude d'affiches
d'expos du moment, l'une d'elle aura peut être retenu votre attention, en bons
petits galopins que vous êtes : une jeune femme blonde, presque nue, le
regard pudique et fuyant. C'est l'affiche de l'exposition « Désir et
volupté à l'époque victorienne » qui se tient au musée
Jacquemart-André. Tiens, tiens. Comme
vous sans doute, la sensualité du thème associée mentalement à la bobine sévère
de la reine Victoria, cela m'a intriguée. L'occasion s'est présentée de mon
côté pour y aller, et je ne l'ai surtout pas laissée passer !
Si
vous avez la chance de pénétrer l'enceinte du musée, vous serez immédiatement
plongés dans une autre époque. Même si la façade extérieure est actuellement en
travaux, l'architecture propre au XIXe siècle de cet hôtel particulier
construit par Henri Parent est déjà une œuvre d'art. Édouard André et son épouse Nélie Jacquemart se sont consacrés
toute leur vie à acquérir de nombreuses peintures, sculptures et
« bimbelots » (c'est à dire de petites statues, pièces d'orfèvrerie,
et autres menues œuvres de salon) au
cours de leurs voyages, transformant leur nid d'amour en petit musée,
particulièrement empreint des peintures italiennes de la Renaissance. En marge
de l'exposition, il vous est possible de visiter le salon de musique, le jardin
d'hiver, les différents salons et appartements privés du couple
Jacquemart-André, accompagnés par un suave air de piano.
Proposée dans un écrin magnifique, l'expo représente à merveille l'idée de Beauté sous l'époque victorienne.
L'exposition
« Désir et volupté » est nichée à l'étage à côté du musée italien. En
partie guidés par un petit clip de présentation, vous serez plus familiers avec
Burne-Jones, Alma-Tadema, Leighton, entre autres grands noms de la Fraternité
Préraphaélite. D'ailleurs, qu'est ce que le Préraphaélisme ? Cette
explication est implicitement expliquée dans l'exposition, je vous la restitue
plus clairement : en réaction à une perte de créativité sous l'ère
victorienne, de jeunes artistes se plongent non pas dans la peinture de la
Renaissance, quelque peu essoufflée selon eux, mais dans la peinture médiévale,
antérieure à l'art de Raphaël donc, simple et à la fois riche en symboles,
onirique et fortement en lien avec la nature. Cette « école » fondée
par Millais, Hunt et Rossetti est vite dissoute, mais les principes esthétiques
du Préraphaélisme feront date à travers la génération d'artistes
suivante : un trait « léché », net et détaillé, et un univers où
la femme est à la fois le sujet et l'objet d'Art.
Cette
manière de concevoir l'art, véritable « Culte de la Beauté » a
quelques traits communs avec le mouvement de « l'Art pour l'art »
(« Aesthetic Movement » outre-atlantique) qui se développe en France
notamment. Dans cette époque d'industrialisation et de rigueur morale, les
amateurs d'art veulent retrouver une certaine poésie au cœur de leur foyer, où
l'homme devient un rouage de la machine économique, et la femme une fée du
logis trop serrée dans son corset et son image sociale. A travers les toiles
présentées, la Femme est célébrée, et synthétise cette envie de beauté des
Anglais(es). Nymphe, reine égyptienne, héroïne de la poésie courtoise ou d'une
pièce de Shakespeare, muse antique, déesse... Elle est partout. Tous les thèmes, tous les univers sont
explorés dans une même quête du corps parfait. Dans les salons, les courbes
sensuelles, les bains, alcôves et autres jardins font chavirer les
« ladies », et grâce aux toiles, le foyer anglais devient une fenêtre
ouverte vers le rêve.
Margot
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