Au cours de l’année 2020, notamment à l’occasion du Rhumfest, deux références attendues dans le monde des spiritueux auraient dû être présentées. Les maisons Rozelieures et HSE, respectivement productrices de whisky single malt et de rhums agricoles se sont échangés des fûts pour réaliser des finitions. Le confinement de mars a eu raison de ces événements. Les bouteilles, elles, sont bien arrivées chez nos cavistes préférés. Cela donne deux excellents spiritueux que je me suis amusé à déguster en même temps en quête de marqueurs communs.
La finition est une tendance importante dans le monde du spiritueux. Elle consiste à extraire une eau de vie de son fût à l’issue du processus de vieillissement, et de compléter ce processus par une finition ou maturation, plus courte donc, dans un autre fût ayant préalablement contenu un autre alcool. Traditionnel dans le monde du whisky, ce procédé est plus récent dans celui du rhum. L’Habitation Saint Etienne est d’ailleurs l’une des premières à l’avoir développé avec sa gamme de « finitions du monde ».
De nombreux points communs entre les deux maisons
HSE propose depuis quelques années déjà deux rhums avec une finition en fût de whisky écossais, mais la distillerie a souhaité se rapprocher d’une maison qui maîtrise 100% de son process. Christophe Dupic (Rozelieures) et Cyril Lawson (HSE) se sont rencontrés dans un salon de spiritueux à New York. Ils étaient voisins de stand et ont beaucoup échangé sur leur produits respectifs et leur vision du monde des spiritueux. Il faut souligner que malgré la distance entre la Martinique et la Lorraine, les deux maisons ont plusieurs points communs : leur maîtrise complète de la production, des terres volcaniques, une identité très marquée, et bien sûr, leur passion pour leurs produits. Rapidement fleurit l’idée d’un partenariat. Un échange de fûts pour des finitions croisées.
Quels fûts ? Quelle base d’eau de vie utiliser ? Combien de temps laisser maturer les jus ?
HSE a fait des tests avec son XO sur des fûts de Rozelieures Subtil collection et Fumé collection en vue d'un assemblage. « Une fois que le jus est dans le fût, il faut le surveiller comme le lait sur le feu », glisse Cyril Lawson. « Il faut s’assurer que la finition ne prenne pas le lead sur le jus d’origine ». L’idée c’est de donner une touche aromatique, tout en gardant l’idée du rhum de départ dans le respect de l’AOC. HSE a finalement décidé de ne pas présenter ce rhum à l’AOC. Nous n’aurons pas d’information sur la durée de son finish. En revanche on peut vous dire qu’il y a un temps différent sur le Subtil et sur le Fumé.
Chez Rozelieures on était d’abord intéressé par le côté végétal et frais de la canne. Le whisky de base est légèrement tourbé. HSE a envoyé des fûts de chêne américain ayant contenu des rhum VSOP. Le boisé de ces fûts permet d’alléger la tourbe. « Le whisky français est jeune, on ne parle pas encore d’âge, ni de durée de vieillissement », précise Christophe Dupic. La finition des whiskys en fut de rhum est de 14 mois.
Il est temps de gouter !
HSE, XO Rozelieures Finish, Martinique, 44°
Au nez, les
marqueurs HSE sont présents. On trouve des arômes de chocolat et de fruits
murs, voire compotés. Le panel est large. D’abord les fruits exotiques (ananas,
fruit de la passion), puis après aération, les marqueurs du whisky font leur
apparition avec les fruits blancs, comme le coing et la poire. En bouche on
retrouve la sucrosité, les herbes, et les épices (cardamome). Puis, apparait la
céréale torréfiée, encore un marqueur de l’eau de vie de malt. La finale est
légèrement fumée, mais ça reste très agréable.
Whisky Rozelieures HSE Finish, Lorraine, 43°
Bien plus clair
que son homologue antillais, le whisky présente un nez complexe avec des arômes
de céréales et des notes légèrement terreuses et vineuses. La tourbe laisse
place à des arômes fumés, puis à la poire. Enfin, après aération on distingue
une certaine rondeur assurément liée au finish rhum. En bouche l’attaque est
très vive, très whisky, pas forcément agréable pour l’amateur de rhum. Par la
suite se présente une sucrosité très intéressante. En fin de bouche on revient
sur la céréale mais torréfié. La poire disparait. La finale est soutenue mais
plus agréable.
Guillaume
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